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L'age de la Terre

Une des questions qui a préoccupé l'Homme depuis qu'il a commencé à explorer son Univers, c'est l'âge de la Terre. Comme on l'a vu à la section 1, les Anciens avaient une conception toute fixiste de la surface de la Terre: océans et continents ont toujours occupé une position fixe durant toute l'histoire de la planète. On croyait que la Terre s'était formée par une série de grandes catastrophes rapides et qu'elle avait ainsi acquis la physionomie qu'on lui connaît aujourd'hui : océans, continents, volcans, lacs et montagnes avaient été dessinés une fois pour toutes! La Bible a repris le relais de cette conception avec l'idée de la Création en six jours (une sorte de catastrophisme-créationisme). Cette vision de la formation de la Terre a dominé les esprits jusqu'au 19ième siècle.

Cette façon de voir l'histoire de la Terre supposait une histoire de courte durée. Certains ont même tenté de chiffrer ce temps. Ainsi, l'ecclésiastique anglais James Husher (1654) à établi, par le décompte des générations de la Bible, que la Terre avait été créée en 4004 av. J.C. En y additionnant nos deux millénaires, la Terre aurait donc quelques 6000 ans. On est porté aujourd'hui à sourire d'une telle démarche, mais il faut se reporter à l'époque: la Bible représentait la somme des connaissances, et Husher a appliqué une méthode tout à fait scientifique: le décompte des générations. Dans une perspective où l'Homme représentait le début de l'Univers, la démarche se tenait. Beaucoup moins sérieux cependant sont les calculs plus précis et en apparence plus savants de son disciple Lightfoot: la Terre fut créée à 9h00, le 26 octobre, 4004 av. J.C.! Pas plus sérieux ces créationnistes qui encore aujourd'hui s'attachent à cet âge de 6000 ans pour notre planète!

Ce n'est qu'à la fin du 18ième siècle qu'un physicien écossais, James Hutton, a proposé qu'on pouvait expliquer les phénomènes anciens, et partant refaire l'histoire de la Terre, à partir de l'observation des phénomènes actuelles. Il formula l'idée que les causes actuelles ont agi dans le passé et qu'elles ont produit les mêmes effets (théorie de l'uniformitarisme). Il fut suivi en cela, au début du 19ième siècle, par le géologue Charles Lyell qui implanta l'idée dans la communauté scientifique.

Ainsi, la simple observation de la nature montrait bien que les temps impliqués étaient beaucoup plus longs que ce que supposaient les catastrophistes et les créationistes. Par exemple, on observait des taux de sédimentation (dépôt des sédiments) de l'ordre de 1 cm/10 ans (1 m/1000 ans) en certains endroits. A ce rythme, une séquence sédimentaire de 1000 mètres d'épaisseur (ce qui est commun) aurait mis 1 million d'années à se déposer. Beaucoup de séquences excèdent, et de loin, cette épaisseur, atteignant souvent les quelques kilomètres. On est bien loin du 6000 ans de Husher.

Néammoins, certains ont tenté de chiffrer l'âge de la Terre. D'abord, en utilisant justement les taux d'accumulation des sédiments. On en est arrivé à des valeurs se situant entre 3 millions et 3,5 milliards d'années, ... une fourchette pour le moins imprécise! C'est qu'évidemment il faut savoir que les taux de sédimentation sont très différents d'un endroit à un autre, en raison de la dynamique interne et externe de la Terre.

Une hypothèse qui a eu une grande vogue en son temps est celle qui se fondait sur le taux de refroidissment de la Terre. Elle a été proposée en 1866 par Lord Kelvin, physicien de grande réputation et perçu comme le scientifique européen le plus écouté de son époque, ce qui n'est certes pas étranger à la vogue de l'hypothèse. Pour Lord Kelvin, le flux de chaleur qui s'échappe de la Terre correspondait à son refroidissement progressif depuis sa formation. Connaissant les valeurs de ce flux et la température de la matière en fusion au début de la formation de la Terre, on pouvait donc calculer depuis combien de temps se refroidissait notre planète, ce qui correspondrait à son âge. Kelvin en arriva à un âge légèrement inférieur à 100 millions d'années. La réputation du proposeur fit en sorte que les vues de géologues comme Darwin, Hutton et Lyell qui avaient proposé des âges beaucoup plus vieux (mais peu précis) furent discréditées au profit de l'âge Kelvin.

On a voulu aussi utiliser la salinité des océans, en partant de l'idée que la salinité actuelle des océans (35 g/kg ou 35‰) est le résultats de l'accumulation des sels apportés par les cours d'eau qui érodent les continents. Connaissant la salinité des eaux douces continentales et la quantité d'eau apportée annuellement aux océans, on a donc calculé qu'il aura fallu entre 80 et 89 millions d'années pour "saler" nos océans (L'océan régulateur de températures et de salinité, pour plus de détails à ce sujet). Et si on reprenait les calculs avec des données actualisées, on obtiendrait plutôt 13 millions d'années. Encore ici, on avait oublié la dynamique terrestre changeante. De plus, les paléontologues avaient réalisé depuis longtemps que les faunes marines anciennes semblaient indiquer des conditions de salinité relativement constante durant toute la période du Cambrien à nos jours.

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Il aura fallu attendre le début du 20ième siècle, et la découverte de la radioactivité, pour comprendre que le flux de chaleur qui s'échappe de la Terre est dû à la désintégration radioactive de certains éléments et non au refroidissement de la Terre. De plus, cette découverte est venue fournir l'outil qui a permis de dater la formation de la Terre à 4,55 milliards d'années, un chiffre bien au delà de l'âge Kelvin.