Les Iles Kerguelen montrent la plus grande diversité d’enclaves ultramafiques et mafiques remontées par des laves alcalines dans un contexte océanique. Elles ont été remontées au cours de l’activité volcanique la plus récente du point chaud de Kerguelen.
La nature réfractaire des harzburgites est notamment démontrée par leur caractère très magnésien, leurs teneurs très faibles en Al2O3 et CaO. Ce caractère réfractaire est relié à l’épisode de fusion partielle de fort degré qui a affecté le manteau supérieur (15-25%) au cours de la formation de l’archipel des Kerguelen à proximité de la ride Sud Est Indienne, il y a environ 40 Ma. Les différents événements métasomatiques postérieurs associés à la circulation de magmas dans le manteau supérieur à l’aplomb de l’archipel, ont essentiellement eu lieu en contexte intraplaque océanique.
Les harzburgites sont subdivisées en harzburgites protogranulaires à diopside chromifére et en harzburgites poeciloblastiques à augite magnésienne. Les harzburgites poeciloblastiques ont été percolées par de grands volumes de magmas très alcalins, sous-saturés en silice et riches en volatils et qui ont entrainé la cristallisation de l’augite magnésienne parfois associée à la phlogopite et très rarement à une pargasite titanifère.
La majorité des dunites se sont formées au cours de l’interaction entre un protolithe harzburgitique et le même type de magmas, par résorption de l’orthopyroxène. Elles contiennent également une augite magnésienne souvent associée à la phlogopite mais aussi à une pargasite titanifère. Les magmas percolants présentent des affinités avec les laves hyper alcalines qui affleurent à la surface de l’archipel et qui sont l’expression la plus récente de l’activité du point chaud.
Les harzburgites poeciloblastiques et les dunites montrent aussi des évidences de la circulation plus tardives de petits volumes de liquides silicatés alcalins et carbonatitiques. Des échantillons sont recoupés par des veinules contenant des feldspaths (alcalin et plagioclase) ± olivine II ± chromite II ± rutile ± ilmenite ± armalcolite. Cette paragénèse métasomatique a cristallisé, en conditions réductrices, à partir d’un liquide silicaté alcalin très pauvre en volatils. De nombreuses dunites ainsi que quelques harzburgites contiennent des veinules tapissant les joints de grain et associé à de petites poches autour des spinelles. Ces veinules et poches contiennent un assemblage à carbonates + diopside ± olivine II ± amphibole ± phlogopite ± chromite ± ilmenite ± rutile ± apatite ± verre ultrabasique. Cette paragénèse est typique d’un métasomatisme lié à la percolation d’un magma carbonatitique qui est lui même interprété comme produit par la démixion d’un magma sous-saturé en silice, très alcalin et riche en volatils ayant subi un fractionnement important par réaction-cristallisation. La fraction compémentaire du liquide carbonatitique issue du processus de démixion serait le liquide silicaté très alcalin qui a produit les veinules à feldspath et armalcolite. Finalement des poches métasomatiques contenant un assemblage minéralogique constitué de clinopyroxéne ± olivine IIplagioclase sodique ± spinelle II ± verre ± apatite ± rutile s’observe dans quelques harzburgites poeciloblastiques. Cette minéralogie secondaire témoigne d’une réaction entre les harzburgites et un magma carbonatitique a affinité sodique et dolomitique.
par Georges CEULENEER, Pierre GENTHON, Michel GREGOIRE, Marc MONNEREAU, Anne ORMOND, Michel RABINOWICZ et Mike TOPLIS.