Principaux paramètres de potabilité
La qualité d'une eau souterraine est caractérisée par un certain nombre de paramètres physiques et chimiques, déterminant à leur tour des caractères organoleptiques seuls immédiatment perceptibles pour l'usager.
Les paramètres pris en compte sont:
- la dureté de l'eau correspondant à sa minéralisation en calcium et magnésium
- le pH qui dépend de la teneur en ions;
- la teneur en gaz dissous issus de l'atmosphère (O2et CO2 );
- la teneur en substances minérales disoutes généralement sous forme ionique: anions (bicarbonates, chlorures, sulfates, nitrates, fluorures) et cations (calcium, magnésium, sodium, potassium, fer, manganèse, ammonium);
- la turbidité, produite par des matières en suspension (argiles) dans les aquifères karstiques.
A ces paramètres physico-chimiques s'ajoutent des paramètres microbiologiques souvent déterminants dans les aquifères calcaires.
Une teneur trop élevée d'un ou plusieurs composants chimiques cause des désagréments au consommateur (saveur, risques sanitaires) et aux canalisations (corrosion, entartrage...) L'eau est alors jugée impropre à la consommation (et à sa distribution) à moins de subir au préalable un traitement aproprié (cas des eaux chargées en nitrates). D'autre part, une teneur élevée d'un élément chimique peut être l'indice d'une pollution par d'autres substances toxiques: les résidus de pesticides accompagnent généralement la migration des nitrates d'origine agricole à la nappe (atrazine, simazine employées en particulier comme déserbants des cultures de maïs).
Les paramètres qui déclassent une nappe pour l'eau potable ou impliquent un traitement correcteur pour sa potabilisation sont dans la pratique: la dureté, le pH, la teneur en sulfates, la turbidité, la teneur en Fe, Mn et F.
La dureté
La dureté totale d'une eau est produite par les sels de calcium et de magnésium qu'elle contient. On distingue:
* une dureté carbonatée qui correspond à la teneur en carbonates et bicarbonates de Ca et Mg;
* une dureté non carbonatée produite par les autres sels.
La dureté est mesuré par le titre hydrotimétrique exprimé en °F (degré français); 1 °F correspond à 10 mg de carbonate de Ca dans 1 litre d'eau..
Des valeurs faibles correspondent à des eaux douces: dans les sables du Crétacé inférieur du Pays de Bray, l'eau à un titre hydrotimétrique compris entre 5 et 20 °F. Les eaux dures ont un titre compris entre 20 et 35 °F: c'est le cas de l'eau de la nappe de la craie dans la Somme. Des valeurs supérieures indiquent des eaux trés dures (nappe captive de la craie, nappes de l'Eocène...)
La dureté de l'eau influe essentiellement sur l'état des canalisations et des appareils de chauffage, et sur le lavage du linge. Une eau dure donne des dépôts de tartre dans les canalisations, les bouilloires et chauffe-eau, ainsi que dans les filtres des robinets. D'autre part, ces dépôts carbonatés ont un effet bénéfique en protégeant les conduites de la corrosion. Ces eaux dures pourront être adoucies par le distributeur ou par l'utilisateur (échange d'ions sur résine dans l'industrie ou chez le particulier).
En revanche, une eau trop douce est agressive vis-à-vis des canalisations; en particulier la corrosion des canalisations en plomb devient dangereuse pour la santé du consommateur. Un traitement par reminéralisation est indiqué.
Le pH
Le pH de l'eau conditionne les équilibre physico-chimiques, en particulier l'équilibre calco-carbonique et donc l'action de l'eau sur les carbonates (attaque ou dépôt). Le pH est acide dans les eaux des aquifères sableux ou granitique. Il est alcalin dans les calcaires. Le pH est corrigé selon le cas par élimination du CO2 dissous en excès ou par correction de la dureté carbonatée.
La turbidité
La tubidité peut être importante dans les aquifères karstique. Elle occasionne des désagréments dans l'aspect de l'eau et sa saveur (goût de terre). Les pics de turbidité suivent les fortes précipitations; ils sont fréquents dans l'aquifère crayeux de Normandie. Les eaux de ruissellement chargées de particules argileuses - et d'autres matières indésirables- s'engoufrent dans les bétoires. La vitesse de circulation de l'eau dans le réseau souterrain en crue ne permet pas leur décantation.;de plus des particules déposées précédemment sont arrachées aux cavités et augmentent la charge en suspension que l'on retrouve à l'exutoire.
Toute aménagement augmentant le ruissellement superficiel et l'érosion des sols accentue la turbidité: remembrement agricole supprimant les haies et talus, pratiques agricoles laissant les sols à nu pendant l'hiver, drainages des eaux superficielles vers les gouffres et bétoires, comblement des mares stockant les eaux de ruissellement.
Les sulfates
Les sulfates contenus dans l'eau souterraines sont fournis par la dissolution du gypse. Le gypse est un sulfate de calcium hydraté qui est faiblement soluble (7 g/l dans les conditions normales). Les nappes de l'Eocène ont des teneurs fréquentes comprises entre 25 et 100 mg/l mais qui peuvent localement dépasser 250 mg/l (valeur limite admissible, voir paragraphe 4) et même 1 g/l dans les formations à veines de gypse, valeurs qui rendent cette eau non potable. Les nappes captives en terrains calcaires sont moyennement à trés sulfatées (30 à 200 mg/l, parfois supérieures à 250 mg/l). Les autres nappes de la région , comme la nappe libre de la craie, ont des teneurs en sulfates inférieures à 50 mg/l.
Le Fer
Le fer est un élément assez abondant dans les roches (quelques %) sous forme de silicates, d'oxydes et hydroxydes, de carbonates et de sulfures. La craie contient des nodules de marcasite (sulfure); les terrains jurassiques présentent un niveau d'oolithes en oxydes de fer. Le fer est soluble à l'état d'ion Fe++ (ion ferreux) mais insoluble à l'état Fe+++ (ion ferrique). La valeur du potentiel d'oxydo-réduction (Eh) du milieu conditionne donc sa solubilité et la teneur de l'eau en fer. Les nappes captives isolées des échanges avec la surface sont en conditions réductrices: leur eau est ferrugineuse. Ce fer dissous précipite en mileu oxydant, en particulier au niveau des sources et à la sortie des conduites. La présence de fer dans l'eau peut favoriser la prolifération de certaines souches de bactéries qui précipitent le fer ou corrodent les canalisations. L'eau est ferrugineuse notamment dans les nappes captives de la craie et des sables de l'Albien. Un traitement spécifique est alors nécessaire (précipitation en milieu oxydant).
Le Manganèse
Le manganèse accompagne généralement le fer dans les roches. comme le fer, sa solubilité dépend de l'Eh. Il est peu abondant dans les eaux de la région.
Le Fluor
La teneur en fluor dépend beaucoup du temps de contact de l'eau avec les minéraux fluorés de l'aquifère. Elle est plus élevé dans les nappes captives. Dans la nappe de la craie, l'ion F est fourni principalement par les minéraux phosphatés (apathites). Sa teneur ne doit pas excéder 1,5 mg/l