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Les dépôts continentaux

1. LES DEPOTS EOLIENS

Le vent dépose sa charge quand sa vitesse diminue. Tout type d'obstacle peut produire une sédimentation dans la zone protégée qu'il délimite: une touffe d'herbe, un mur ...Ces dépôts peuvent être remis en mouvement s'ils ne sont pas fixés par la végétation.. Les dépôts sont des sables et des poussières.

Figure 1: accumulation de sable en arrière d'un obstacle (ici, une touffe d'herbe)
Figure 1: accumulation de sable en arrière d'un obstacle (ici, une touffe d'herbe)

1.1 Dépôts de sable

  • a) les dunes

Les corps sédimentaires les plus caractéristiques sont les dunes éoliennes. Leur hauteur est de 5 à 10 m pour une longueur d'onde de quelques centaines de mètres au maximum. Leur forme varie en fonction du régime des vents et de leur charge en sable. On distingue: * les barkhanes, dunes en croissant avec concavité abrupte sous le vent * les dunes paraboliques en forme de langue (forme linguoïde) dont la convexité abrupte est sous le vent; * les dunes transversales, rubans perpendiculaires à la direction du vent; comme précédemment, la pente sous le vent est la plus forte; * les dunes longitudinales ou seif, parallèles au sens du vent; * les dunes d'interférence dont la structure complexe reflète le régime changeant des vents.

Figure 2: Principaux types de dunes éoliennes. (1) barkhanes;(2) dunes linguoides; (3) dunes transversales à crêtes rectilignes; (4) dunes d'interférence
Figure 2: Principaux types de dunes éoliennes. (1) barkhanes;(2) dunes linguoides; (3) dunes transversales à crêtes rectilignes; (4) dunes d'interférence

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Les accumulations sableuses de trés grande taille, des dizaines de mètres de hauteur pour des longueur d'onde de l'ordre du kilomètre, s'appelle des draas. La fameuse dune du Pilat, dans les Landes, est un draa. Un champ de dunes ou draas constitue un erg; le Grand Erg Oriental du Sahara couvre des milliers de km2. Les dunes montrent une structure interne en litages entrecroisé. L'orientation des litages obliques et leur taille sont généralement variables; leur inclinaison peut atteindre un angle de 34°.

Figure 3: Structure interne d'une dune éolienne; notez la forte inclinaison et la variabilité des litages (chiffrés en degrés)
Figure 3: Structure interne d'une dune éolienne; notez la forte inclinaison et la variabilité des litages (chiffrés en degrés)
  • b) Les rides

Ce sont des ondulations centimétriques qui couvrent la surface des dunes. Leur crête est perpendiculaire à la direction du vent. Comme les dunes, elles sont asymétriques. Leur longueur d'onde est de l'ordre de la dizaine de cm pour un sable moyen.

  • c) caractères des dépôts sableux éoliens.

Des formations gréseuses anciennes montrent les caractères d'organisation des dunes éoliennes actuelles (variabilité, dimension, inclinaison des litages obliques). C'est le cas des Navajo Sandstones jurassiques aux U.S.A. Les grains sont arrondis et dépolis; ils sont bien classés; la matrice argileuse est faible. Les formations dunaires anciennes restent néanmoins rares. Les sables de Fontainebleau auraient en partie une origine éolienne. On connait également dans des dépôts à dominance sableuse des galets ayant subi l'action érosive du vent: ces "galets éolisés" ont une surface dépolie et une forme polyédrique ("dreikanter"). Les grès des Vosges triasiques en contiennent localement.

1.2 Dépôts de poussière

La quantité de poussière transporté puis déposée par le vent peut être grande mais elle passe inaperçue et sous-estimée parce qu'elle est largement disséminée sur le sol: une couche de quelques dizièmes de mm de poussière répandue sur une surface de plusieurs milliers de km2 représente un tonnage considérable. Chaque année le Sahara perd plus de 100 millions de tonnes de poussière dont une grande partie tombe dans l'océan Atlantique, contribuant ainsi à la sédimentation océanique.

Figure 4: Vitesse de chûte des particules dans l'air; les poussières ont une vitesse de chûte trés faible, elles restent donc trés longtemps en suspension et peuvent être transportées trés loin par le vent
Figure 4: Vitesse de chûte des particules dans l'air; les poussières ont une vitesse de chûte trés faible, elles restent donc trés longtemps en suspension et peuvent être transportées trés loin par le vent

Les dépôts anciens de poussières éoliennes constituent les loess. En France, le loess recouvre le nord du pays d'une couche de quelques mètres d'épaisseur au maximum; il est formé de particules d'argiles, de silice et de calcaire. Il provient de la déflation des matériaux glaciaires quaternaires. Le calcaire est dissous en surface par les eaux d'infiltration : le loess est décalcifié et prend le nom de lehm. En Chine, la couche de loess atteint 600 mètres d'épaisseur. Elle provient de la déflation dans les déserts d'Asie centrale. Une chronologie des temps quaternaire a pu y être établie à partir des variations d'épaisseur des lamines, de leur teneur en carbonate et de leur suscep-tibilité magnétique.

2. LES DEPOTS GLACIAIRES

Les matériaux transporté par les glaciers sont sédimentés lorsque la glace fond. Ils s'accumulent donc à proximité du glacier et constituent les dépôts glaciaires. Ils peuvent être remaniés par les eaux puis déposés: ce sont les sédiments fluvio-glaciaires et glacio-marins. En climat tempéré, les glaciers de montagne fondent en descendant dans les vallées; les matériaux s'accumulent en une moraine frontale qui peut être trés grande et former un amphi-théatre morainique comme celui de Grenay dans l'Isère (moraine frontale du glacier du Rhône à la dernière glaciation würmienne). Si le climat change, par diminution des précipitations et/ou augmentation de la température moyenne, une grande partie, ou la totalité, du glacier disparait: l'ensemble des matériaux des moraines latérales et de fond est déposé dans la vallée.

Figure 5: Moraines d'un glacier de montagne: (A) organisation générale; (B) coupe transversale dans un glacier.
Figure 5: Moraines d'un glacier de montagne: (A) organisation générale; (B) coupe transversale dans un glacier.
Figure 6: (A) remaniement des dépôts glaciaires. (B) dépôts laissés à la fonte d'un glacier
Figure 6: (A) remaniement des dépôts glaciaires. (B) dépôts laissés à la fonte d'un glacier

En climat froid et humide, les glaciers ne fondent pas et atteignent la mer. La glace se fragmente en icebergs qui transportent la charge solide. Ces radeaux de glace dérivent vers des zones plus chaudes et fondent en laissant tomber les matériaux sur les fond marins: ces "pierres tombées" s'appellent des dropstones. . Les moraines sont des dépôts hétérométriques, non classés et comportant beaucoup de matrice. Les blocs et les galets sont anguleux, striés parfois. Les grains de quartz sont anguleux et à cassure conchoïdale. Ces caractères sont également ceux des coulées boueuses et il est difficile de reconnaître les anciennes moraines consolidées nommées tillites. Des conglomérats à éléments anguleux, mal classés et riches en matrice du Précambrien de Normandie avaient été identifiées comme des moraines de la glaciation fini-précambrienne; on les considère maintenant comme des coulées boueuses. Dans le doute, on parle de tilloïde.

En aval des moraines, les torrents remanient les matériaux et les étalent sous forme de complexe fluvio-glaciaire montrant un certain classement des éléments qui conservent néanmoins quelques traces de l'action du glacier (cassures conchoïdales de haute énergie, galets striés). Les sédiments glacio-marins comprennent les remaniements deltaïques au front des glaciers atteignant la mer et les dépôts fins proprement marins, mis en place à une profondeur quelconque, mais contenant des blocs, galets et graviers exotiques apportés par les glaces flottantes. Les "argiles microconglomératiques", argiles marines à dragées de quartz, déposées au cours de la glaciation ordovicienne au Nord du Sahara, sont des sédiments glacio-marins.

3. LES DEPOTS TORRENTIELS

Les matériaux de toute taille transportés par un torrent peuvent être momentanément déposés dans le lit, mais ils sont repris à chaque crue pour être finalement déposés quand la vitesse diminue, c'est à dire lorsque le cours d'eau arrive dans une plaine. Ils forme un éventail lobé, le cône de déjection torrentiel. Chaque lobe correspond à l'étalement des matériaux d'une crue; ceux-ci sont granoclassés d'amont en aval, les éléments fins sont emportés le plus loin. Au pied d'un relief, les cones de déjection de torrents voisins peuvent se joindre et constituer un glacis de piémont continu.

Figure 7: Organisation générale d'un cône de déjection torrentiel; les chiffres désignent les lobes successifs
Figure 7: Organisation générale d'un cône de déjection torrentiel; les chiffres désignent les lobes successifs
Figure 8: (A) coupe longitudinale simplifiée dans un cône de déjection: (1) coulées boueuses, (2) galets, (3) sables et graviers, (4) limons, (B): détail.
Figure 8: (A) coupe longitudinale simplifiée dans un cône de déjection: (1) coulées boueuses, (2) galets, (3) sables et graviers, (4) limons, (B): détail.

Sous climat tempéré, l'eau et les matériaux fins des torrents alimentent les cours d'eau permanents des vallées. Sous climat semi-aride, l'écoulement se fait en nappe sur les piémonts; dans les bassins fermés, l'eau s'accumule en lac temporaire ; l'évaporation précipite la charge dissoute. Ces dépressions à évaporites constituent des sebkhas continentales (chotts algériens de la marge saharienne par exemple).

Figure 9: Epandage de piémont et sebkha continentale. La dépression a souvent une origine tectonique
Figure 9: Epandage de piémont et sebkha continentale. La dépression a souvent une origine tectonique

Les dépôts torrentiels sont représentés par des matériaux généralement grossiers (blocs, galets, sables) disposés en lentilles juxtapposées et superposées qui montrent des litages obliques en cuillère ("stratification entrecroisée"). Les galets sont émoussés; ce sont des blocs anguleux d'éboulis qui ont été usés pendant le transport (une dizaine de km suffit). Ils sont inclinés par rapport au sens du courant et se recouvrent en formant des imbrications (ils sont imbriqués comme les tuiles d'un toit). Les grains de sable sont anguleux et mal classés. Les grains de quartz ont des traces de chocs en "coup d'ongle" et des cassures conchoïdales de forte énergie. Les parties fines constituant la matrice du dépôt sont abondantes.

Figure 10: histogramme de fréquence des tailles des grains d'un sable fluviatile et diminution de l'écart-type d'amont en aval; exemple d'un fleuve marocain
Figure 10: histogramme de fréquence des tailles des grains d'un sable fluviatile et diminution de l'écart-type d'amont en aval; exemple d'un fleuve marocain

Les cônes torrentiels anciens sont identifiés par des conglomérats à matrice abondante et dont les galets sont plus ou moins imbriqués, à la différence de ceux des dépôts glaciaires et des coulées boueuses, associés à des grès en lentilles constitués de litages entrecroisés. Les parties fines, limons et argiles, peuvent montrer des horizons pédogénétiques : ces sols anciens nt des paléosols. Les conglomérats grossiers du faciès "Verrucano" des Alpes du Briançonnais représentent des épandages torrentiels à la fin du Permien et au début du Trias.

4. LES DEPOTS FLUVIATILES

Les rivières sont surtout des agents de transport. Elles déposent néanmoins aux endroits où la vitesse diminue, c'est à dire le long de leur cours et finalement à leur embouchure où peuvent s'ajouter des phénomènes de floculation des argiles et de précipitation de corps en solution.

4.1 Les réseaux fluviatiles

Les formes d'accumulation dépendent des caractères du réseau fluviatile qui sont l'indice de sinuosité et le nombre de chenaux. L'indice de sinuosité est exprimé par le rapport de la distance entre deux points parcourue au fond du chenal sur celle parcourue en ligne droite. Un chenal rectiligne a un coefficient de sinuosité égal à 1. Quatre grands types de réseaux sont distingués:

un chenal plusieurs chenaux
indice de sinuosité faible (>1.5) DROIT EN TRESSE
indice de sinuosité fort (>1,5) MEANDRIFORME ANASTOMOSE

Tableau 1: types de réseaux fluviatiles

Le type de réseau dépend essentiellement de la pente, de la charge transportée, de la stabilité des rives (rôle stabilisant de la végétation). Tous les intermédiaires existent. Une même rivière change de type de sa source à son embouchure. Le réseau est généralement en tresse en amont et à méandres en aval. Les réseaux droits sont rares. Les réseaux anastomosés sont observés dans les zones subsidentes de climat humide. Les réseaux en tresse et méandriformes sont les plus fréquents.

Une rivière dépose dans son ou ses chenaux formant son lit mineur des amas de galets et sables appelés barres. Lors des crues, elle envahit sa plaine d'inondation et y dépose des matériaux généralement plus fins , les limons, contenant une forte proportion d'argile.

Figure 11: principaux types de barres fluviatiles; (1) chenal droit; (2) chenaux en tresse; (3) méandres
Figure 11: principaux types de barres fluviatiles; (1) chenal droit; (2) chenaux en tresse; (3) méandres

4.2 Sédimentation des réseaux en tresse

Elle se fait sous forme de barres longitudinales qui séparent les chenaux. Ces barres deviennent obliques (transversales) dans les courbes; elles sont mobiles et s'accroissent dans le sens du courant ("acrétion longitudinale"), leur forme dépend de la charge et du débit. Elles sont constituées de galets imbriqués qui tombent en avalanche en aval, de graviers, de sable à litage entrecroisé. Elles sont souvent ravinées par le déplacement des chenaux.

Figure 12: Deux coupes dans des dépôts de rivières en tresse: les sables correspondent aux barres longitudinales, les galets sont des remplissages de chenaux qui érodent les barres sous-jacentes
Figure 12: Deux coupes dans des dépôts de rivières en tresse: les sables correspondent aux barres longitudinales, les galets sont des remplissages de chenaux qui érodent les barres sous-jacentes

Les rivières en tresse sont rapides; on les trouve dans les régions de montagne; leur dépôts ressemble beaucoup à ceux des cones torrentiels. De nombreux dépôts molassiques anciens sont ceux de réseaux en tresse: cailloutis du faciès Buntsandstein des Vosges (Trias), cailloutis du plateau de Valensole, du Lannemezan (Tertiaire).

4.3 Sédimentation des réseaux à méandres

La sédimentation se fait sur la rive convexe sous forme d'une barre de méandre. La barre s'accroit latéralement en même temps que la migration du méandre (acrétion latérale). Elle est constituée de sable disposé en litage oblique de grande taille (litage epsilon). Le fond du chenal est pavé de galets (channel lag). Le chenal est bordé par des levées qui le séparent de la plaine d'inondation couverte de dépôts fins. Si une levée est crevée pendant une crue, des sables se répandent dans la plaine d'inondation sous forme d'un microdelta de crevasse (crevasse splay). Les séquences de rivières à méandre sont positives: elles débutent par un pavage de galets et se terminent par des limons de plaine d'inondation montrant des traces de sols et de végétation.

Figure 13: dépôts dans un méandre
Figure 13: dépôts dans un méandre

Les dépôts de plaine d'inondation sont formés de limons et d'argiles. Ils renferment des lentilles décamétriques de sable et de galets qui correspondent à la divagation des chenaux méandriformes. Les sols de végétation sont nombreux.

Figure 14: limons de plaine d'inondation; les lentilles sableuses correspondent aux positions successives des chenaux
Figure 14: limons de plaine d'inondation; les lentilles sableuses correspondent aux positions successives des chenaux
Figure 15: séquence de dépôt d'une rivière à méandres
Figure 15: séquence de dépôt d'une rivière à méandres
Figure 16: Séquences fluviatiles dans un dépôt ancien
Figure 16: Séquences fluviatiles dans un dépôt ancien

4.4 Sédimentation des rivières anastomosées.

Les chenaux anastomosés divaguent peu dans la plaine alluviale qui est fréquemment inondée; elle est couverte de marécage; la végétation est abondante. La vitesse de l'eau est faible, les sédiments sont fins et riches en matière organique. Les remplissage de chenaux se distinguent par des galets et des graviers formant des corps à acrétion verticale (rôle de la subsidence).

Figure 17: Sédimentation d'une rivière anastomosée. Les berges sont stabilisées par la végétation et les chenaux se déplacent peu; ils déposent des graviers en barres à agradation verticale. La plaine d'inondation est trés humide; il s'y dépose des limons, des vases et de la tourbe
Figure 17: Sédimentation d'une rivière anastomosée. Les berges sont stabilisées par la végétation et les chenaux se déplacent peu; ils déposent des graviers en barres à agradation verticale. La plaine d'inondation est trés humide; il s'y dépose des limons, des vases et de la tourbe

4.5 Cas des régions karstiques

Dans les pays calcaires, l'eau courante est chargée d'ions carbonate de calcium en solution. Ce dernier se dépose chaque fois que la pression partielle en gaz carbonique diminue: sortie de réseaux souterrains, cascades, activité des végétaux photosynthétiques... Cette précipitation chimique donne un sédiment calcaire bulleux, le tuf calcaire, semblable à celui formé dans un lac.

4.6 Critères de reconnaissance des dépôts fluviatiles anciens

Après diagénèse, les sédiments fluviatiles donnent des conglomérats, grès, siltites et argilites. De nombreuses séries anciennes sont constituées par ces faciès: sont-elles pour autant d'origine fluviatiles? Les dépôts littoraux présentent les mêmes faciès. Les galets sont usés et aplatis; on admet néanmoins que leur aplatissement est moins grand que dans le cas des galets littoraux. Les sables sont mal ou bien classés, selon la longueur du transport; les grains sont peu usés ou anguleux et montrent des traces de chocs. La proportion d'argile est toujours notable. Les conglomérats et les grès contiennent une fraction de matrice. Les siltites et argilites présentent souvent des horizons de paléosols avec des traces de racines, parfois sous forme de croûtes calcaires (calcrètes). Les faciès sont disposés verticalement en enchainement qui constitue une séquence. Les séquences fluviatiles sont généralement grano-décroissantes (elles sont dites positives), avec un niveau de galets à la base et des limons au sommet. Parmi les structures sédimentaires, on trouve en particulier des rides lingoïdes (en forme de langue) et des grands litages obliques quand le réseau est méandriforme. Les structures orientées (litage oblique, imbrications) montrent un courant en moyenne unidirectionnel. Les fossiles sont généralement absents; on observe seulement des traces d'activité organique dans les limons (terriers, racines). Les grandes formations gréseuses du Dévonien et du Trias d'Europe (Vieux et Nouveaux Grès Rouges) sont des dépôts fluviatiles de réseaux en tresse ou à méandres. L'alternance des périodes d'érosion et de sédimentation dans l'histoire d'une rivière produit des niveaux fluviatiles étagés ou emboités appelés terrasses.

Figure 18: Deux types de disposition de terrasses fluviatiles
Figure 18: Deux types de disposition de terrasses fluviatiles

5. LA SEDIMENTATION LACUSTRE

5.1 Généralités

Un lac est un corps d'eau permanent enclavé dans le continent et généralement constitué d'eau douce. La taille deslacs est trés variable, depuis les marécages de faible profondeur jusqu'aux véritables mers intérieures que sont les Grands Lacs américains. La salinité est également trés variable: les corps sursalées du Grand Lac Salé et de la Mer Morte sont considérés comme des lacs, de même pour la Mer Caspienne et la Mer Noire qui sont sous-salées par rapport à l'eau de mer. Les petits lacs ont des origines trés diverses: lagune de plaine cotière (exemple l'étang de Thau), méandre abandonné de plaine alluviale, lac de plaine deltaïque (étang de Vaccarès), de surcreusement glaciaire, lac de cratère...Les grands lacs ont une origine tectonique: lacs du Grand Rift Africain, Mer Morte... Du fait de leur isolement, les caractères des lacs varient en fonction du climat, de l'apport des rivières, de l'environnement géologique, de la végétation sur les berges et de l'activité biologique dans le lac. Le confinement est trés fréquent; il conduit à la stratification de l'eau et à l'anoxie du fond, à la précipitation de sels si le climat est chaud et sec. L'eau d'un lac est soumise à l'action du vent qui crée des vagues en surface. Des courants profonds peuvent brasser l'eau dans son ensemble. L'agitation de l'eau est maximale le long des berges.

5.2 La sédimentation lacustre actuelle

  • a) La sédimentation détritique

Les matériaux apportés par les rivières se déposent dans un lac selon une zonation concentrique assez théorique qui dépend de l'hydrodynamisme: galets le long des rives, sables dans les zones périphériques soumises à l'action des vagues, vases dans le centre plus profond et plus calme. En fait la distribution des matériaux dépend de la position des deltas dans le lac.

Figure 19: distribution des matériaux dans le Lac Léman
Figure 19: distribution des matériaux dans le Lac Léman
Figure 20: coupe schématique dans un lac oligotrophe
Figure 20: coupe schématique dans un lac oligotrophe

On distingue 3 types de milieux dont les dépôts dépendent de l'hydrodynamisme et de la nature des apports détritiques.

* 1) les berges: dépôts grossiers (galets, sables); pour les petits lacs dont l'hydrodynamisme est faible ou qui ne reçoivent que des parties fines, dépôts fins bioturbés (vases).

* 2) les pentes et le fond: hydrodynamisme faible, absence d'oxygène; vases laminées à bulles de méthane provenant de la décomposition de la matière organique; précipitation possible de carbonates; horizons sableux dus à l'arrivée de turbidites. Les vases laminées peuvent montrer une alternance de lamines claires et sombres correspondant à une rythmicité annuelle: ce sont des varves. Dans le Lac de Zurich, les lamines claires sont carbonatées et se déposent l'été, les lamines sombres détritiques se déposent l'hiver. Dans le Lac de Constance, les lamines claires sont des turbidites sableuses mises en place à la fin de l'hiver, les lamines sombres sont des vases de décantation d'été.

* 3) l'éventail deltaïque sous-lacustre: il comporte des chenaux, des lobes, des levées; des glissements et des courants de turbidité se déclenchent quand l'apport détritique est important.

  • b) La sédimentation chimique et biochimique

Sa nature dépend du climat, du chimisme de l'eau, de l'activité organique. Sous climat froid, l'hydroxyde ferrique précipite en pisolites, les frustules siliceuses de diatomées s'accumulent. Sous climat tempéré, il y a surtout précipitation de carbonate de calcium par mécanisme purement chimique ou par l'intermédiaire des organismes (algues, cyanobactéries, plantes supérieures, mollusques...) La calcite précipite en manchon autour des plantes et entoure les clastes pour former des oncolites qui peuvent s'accumuler en un sable calcaire. Les débris carbonatés du phytoplancton constituent une vase calcaire sur le fond. En climat humide et frais, la végétation herbacée se décompose sur place en tourbe. Sous climat chaud et humide, l'eau se stratifie et le fond devient anoxique. La matière organique s'accumule en grande quantité et donne un sapropèle (vase noire) ou un lignite (débris de matière ligneuse). En climat sec, l'évaporation est forte et les sels précipitent sur les berges (gypse, halite, silice...)

Les calcaires lacustres sont des travertins. Ils montrent généralement des traces d'activité ou des débris organiques et contiennent des détritiques siliceux. Les principaux faciès sont les calcaires laminés, les calcaires micritiques massifs à mollusques, à charophytes, à ostracodes. Sur les berges temporairement émergées et dans les marécages se déposent les calcaires palustres renfermant des traces de racines, des restes de plantes aériennes, des fentes de dessication, des indices de pédogénèse, des traces d'activité algaire (stromatolites).

Figure 21: Milieux palustres et lacustres
Figure 21: Milieux palustres et lacustres

5.3 Cas des sebkhas continentales.

Dans les régions où l'évaporation est importante (climat aride), l'eau des lacs s'évapore en partie ou totalement pendant la saison sèche. Le lac devient sursalé ou disparait en laissant sa charge dissoute qui précipite sous forme d'évaporites. Ces étendues salées sont des sebkhas; elles occupent généralement des dépressions fermées (endoréiques). Les sels sont mélangés à de nombreux matériaux détritiques apportés par les rivières temporaires. C'est le cas des chotts de la marge nord du Sahara, des lacs salés du Désert Danakil (Afrique de l'Est), du Grand Lac Salé d'Amérique du Nord.

5.4 Les sédiments lacustres anciens

Leurs critères de reconnaissance sont les suivants:

  • absence de faune marine; fossiles d'animaux terrestres ou d'eau douce (Gastropodes pulmonés, certains bivalves, poissons...); beaucoup de restes végétaux.
  • peu de figures sédimentaires d'origine hydrodynamique à la différence du milieu marin (pas de marée, action des vagues faible); traces d'éxondation fréquentes.
  • cortège évaporitique particulier quand la composition chimique de l'eau est différente de celle de la mer.
  • traces fréquentes de paléo-altérations (croûtes calcaires, paléosols).

Parmi les sédiments lacustres ou palustres anciens, citons en certains qui ont, ou qui ont eu, une importance économique:

  • les dépôts houillers du Stéphanien du Massif Central (accumulation de végétaux dans des marécages);
  • les lignites du bassin lacustre tertiaire d'Aix en Provence;
  • les calcaires tertiaires de Brie et de Beauce;
  • les "Marnes de Pointe Noire" du bassin côtier du Congo: ce sont des argiles calcaires feuilletées d'âge crétacé inférieur. Elles sont riches en pyrite et en matière organique (de 6 à 20 %). La matière organique est un sapropèle formé des débris d'une algue lacustre du genreBotryococcus. Ce type de sapropèle se forme actuellement au fond du Lac Tanganyika. Ces marnes constituent la roche mère du pétrole des gisements de la côte du Gabon, Congo et Cabinda.

6. LES CONCRETIONS DE GROTTES

Les concrétions de grottes des pays calcaires, ou spéléothèmes, ont la même origine chimique que les travertins. L'eau des précipitations, enrichies en dioxyde de carbone, s'infiltre par les fissures et dissout la calcite de la roche. Le carbonate de calcium précipite quand la teneur en CO2 diminue et/ou que l'eau s'évapore. Ainsi se forment toutes les variétés de concrétions (stalagtites, stalagmites...) qui font la renommée de certains systèmes souterrains. Ces concrétions ont une grande utilités dans les grottes préhistoriques car elles peuvent être datées.

7. CONCLUSION

La sédimentation continentale est essentiellement constituée par des accumulations détritiques. Les sédiments d'origine chimique ne se trouvent guère que dans les lacs, marécages,  sebkhas et grottes. Les sédiments et les roches correspondantes sont consignés dans le tableau ci-dessous.

agent de transport milieu de dépôt sédiment roche
GRAVITE SEULE PENTE EBOULIS BRECHE
GRAVITE+EAU PENTE COULEE BOUEUSE BRECHE
TORRENT PENTE, VALLEE GALETS POUDINGUE
RIVIERE PLAINE SABLES LIMONS (TUF CALCAIRE) GRES PELITE (TUF CALCAIRE)
(RIVIERES) LAC et MARECAGE SABLE, BOUE carbonatée, TRAVERTIN TUF CALCAIRE TRAVERTIN
EAU D'INFILTRATION GROTTES SPELEOTHEMES SPELEOTHEMES
GLACE MONTAGNESZONES POLAIRES MORAINES TILLITE (=brèche)
VENT ZONES ARIDES SABLE POUSSIERE GRES SILTITE, LOESS