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Les dépots océaniques

Dans son ensemble, la charge sédimentaire du littoral n'est qu'en transit; en bout de piste, le gros des sédiments qui proviennent de l'érosion des continents va se retrouver surtout sur le glacis aux pieds du talus.

Un partie de la charge sédimentaire du littoral est transportée vers le large (l'offshore), principalement par suspension. Il s'agit des sédiments à particules fines, soit les boues et les sables très fins. Occasionnellement, lors des grandes tempêtes par exemple, des sables un peu plus grossiers peuvent être amenés dans l'offshore; mais, dans l'ensemble, l'offshore, et particulièrement la marge du plateau continental, se caractérisent par l'empilement de sédiments plutôt fins. L'autre partie de la charge sédimentaire du littoral, soit les sédiments plus grossiers, sables et graviers, est apportée à la base du talus, sur le glacis continental. Ces sédiments sont chenalisés dans les canyons sous-marins qui, à plusieurs endroits, entaillent le plateau continental. Ces canyons sont le plus souvent les vestiges d'une érosion qui s'est faite durant des périodes où le niveau des mers était beaucoup plus bas qu'aujourd'hui; certains prennent leur source tout près du littoral.

Les sédiments y sont transportés par divers mécanismes, tels les avalanches, le glissement en masse, les courants de turbidité, ou la simple reptation (un glissement très lent de la masse sédimentaire). Il se forme des cônes sédimentaires très volumineux à l'embouchure des canyons, de véritables deltas des grandes profondeurs. A la marge du plateau continental, au voisinage de la rupture de pente et sur le talus, l'accumulation des matériaux crée des masses sédimentaires souvent en équilibre fragile et le moindre séisme ou simplement les effets de la surcharge contribuent à briser l'équilibre, amenant fréquemment des avalanches qui entraînent de grandes masses de sédiments qui se déposent sur le glacis et construisent ainsi ce dernier.

La sédimentation à la marge continentale est donc principalement terrigène, c'est-à-dire que les matériaux proviennent de l'érosion des continents. Mais l'océan contribue aussi à produire ses propres sédiments. Le plancton est un des éléments essentiels des océans.

Le plancton constitue l'ensemble des microorganismes qui vivent à la surface des océans, dans une couche qui fait jusqu'à plusieurs dizaines de mètres d'épaisseur et qui dépasse même les 100 mètres par endroits; c'est une véritable soupe organique. Une grande proportion de ces microorganismes possède un squelette minéralisé, soit en carbonate de calcium (CaCO3, le minéral calcite ou aragonite), comme par exemple les foraminifères ou certaines microalgues du nannoplancton, soit en silice (SiO2), comme les diatomées et les radiolaires. Après la mort d'un individu, son squelette devient une particule sédimentaire. Il s'ensuit que la surface des océans produit une pluie continuelle de très fines particules. Cette pluie, composée de matières organiques non encore oxydées (M.O.), de CaCO3 (calcite et aragonite) et de silice (SiO2) produit une couche sédimentaire sur le plancher océanique. Il existe une limite naturelle en milieu océanique qu'on appelle la CCD (carbonate compensation depth = niveau de compensation des carbonates) et qui a une influence importante sur la composition des sédiments des fonds océaniques. Le plancher océanique se trouve par endroits sous ce niveau, mais en d'autres endroits au-dessus de ce niveau.

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En somme, le gros des sédiments au large des marges continentales est produit par l'océan lui-même, biologiquement; ces sédiments forment, à la grandeur des plaines abyssales et des zones de dorsales, une couche composée d'un mélange de matières organiques, de silice et possiblement de carbonates, avec des proportions variables d'argiles et de poussières atmosphériques.

Au milieu des années 1970, une découverte étonnante, les sources hydrothermales des fonds océaniques, a mis en évidence un type très particulier de dépôts océaniques: des dépôts métallifères de sulfures massifs. Ces dépôts se font à la faveur d'un système hydrothermal aux dorsales médio-océaniques illustré par le schéma suivant:

Des sources hydrothermales jaillissent de grandes cheminées, les fumeurs noirs, sur les fonds océaniques. Elles proviennent du mélange de deux types de fluides: 1) les fluides hydrothermaux magmatiques, issus des vapeurs d'eau qui s'échappent du magma qui cristallise; ces fluides hydrothermaux qui peuvent être chargés en métaux dissouts s'infiltrent dans les fractures de la croûte océanique et remontent vers la surface; 2) l'eau de mer qui s'infiltre aussi dans les fractures de la croûte; ces eaux marines ont des températures de l'ordre de 2°C, un pH marin légèrement alcalin de 7,8 et sont oxydantes; elles contiennent passablement d'ions sulfates (SO42-), mais sont très pauvres en métaux. Le mélange se fait en grande profondeur (quelques milliers de mètres). C'est un mélange hydrothermal à 350°C, bien différent de l'eau marine, qui est craché par les sources des fonds océaniques. Il est éjecté avec des vitesses de 2 à 4 cm/sec; il est réducteur et son pH est acide (3,5); il contient de l'hydrogène sulfuré (H2S) et, surtout, il est très chargé en métaux tels que le fer, le manganèse, le zinc et le cuivre. C'est ce qui conduit à une accumulation de sulfures massifs métallifères.

Comme le montre le schéma qui suit, lorsque le mélange de la source hydrothermale rencontre l'eau marine riche en ions sulfates, il se forme d'abord un collet de sulfate de calcium (CaSO4; anhydrite) par précipitation chimique; puis à la faveur d'une réaction chimique entre ce sulfate de calcium et les ions métalliques de la solution chaude, le sulfate est remplacé par les sulfures de fer, de zinc et de cuivre.

La présence d'inclusions d'anhydrite persistant dans les sulfures métalliques témoignent de ce processus de remplacement. Progressivement, se construit la cheminée par croissance de son collet de sulfate de calcium qui, exposée à la solution chaude métallifère, se transforme en sulfure métallique.

Il y a un autre aspect important relié à l'existence de ces sources hydrothermales. Ce système agit comme une pompe très efficace qui aspire l'eau de mer à travers la croûte océanique et la réinjecte dans le bassin océanique au niveau des sources. On évalue qu'il faut de 6 à 10 millions d'années (Ma) pour que tout le volume d'eau des océans passe à travers cette pompe; en d'autres termes, l'eau des océans est recyclée à chaque 6 à 10 Ma.