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Interactions magmas/fluides/roches dans le manteau continental archéen

Le but de ce travail est de caractériser les processus de métasomatisme mantellique probablement archéen qui affecte le manteau supérieur sous les zones cratoniques. Nous avons échantillonné de façon intensive et sélective une série d’enclaves mantelliques au niveau de la région de Kimberley située au coeur du craton du Kaapvaal, en Afrique du Sud, enclaves qui ne montraient pas d’évidences de processus métasomatiques plus récents, notamment reliés à l’activité kimberlitique. La région de Kimberley est très intéressante parce qu’elle aurait subi un orogène vers 2.9 Ma et constitue de ce fait une région dont le manteau supérieur a potentiellement subi des processus de métasomatisme relié à un contexte de convergence d’âge archéen. Des études préliminaires que nous avions entreprises sur les enclaves mantelliques récoltées dans la région de Kimberley font apparaître des évidences de processus métasomatiques probablement dues à la circulation dans un manteau très réfractaire de magmas/fluides reliés à une lithosphère océanique subductée, qui pourrait, compte tenu du contexte régional, être archéenne. Notamment il semble que ces réactions soient à l’origine de la richesse en orthopyroxène de ces échantillons, orthopyroxène formé par des réactions de silicification des péridotites du type olivine + magma (fluide) --> orthopyroxène. Dans cette optique le but de notre recherche est de caractériser les signatures minéralogiques, chimiques et isotopiques reliées aux réactions probablement archéennes magmas/fluides -manteau réfractaire. Ce point est abordé par l’étude des échantillons de péridotites et de pyroxénites que nous avons échantillonnés et sélectionnés sur la base de l’absence en leur sein de signatures métasomatiques récentes (notamment kimberlitique, cf paragraphe précédent). Ces échantillons sont de deux types : certains présentent, comme nous l’avons signalé précédemment, des évidences de réactions avec des magmas et/ou des fluides différentes des magmas/fluides phanérozoïques et sont donc les plus susceptibles de nous renseigner sur l’histoire métasomatique purement archéenne du manteau cratonique. Le second type d’échantillons correspond à des péridotites très réfractaires qui ne présentent aucunes évidences de réactions métasomatiques ni anciennes ni récentes et qui représentent le protolithe mantellique archéen. L’étude détaillée de ces deux types d’échantillons permet de déterminer : (1) L’origine, l’âge d’intervention, la composition et l’évolution des agents réactifs potentiellement archéens (magmas, fluides) et leur lien éventuel avec des plaques subductées, (2) les effets de ces processus métasomatiques sur la composition de la croûte continentale. Il a été en effet proposé que des réactions entre des magmas/fluides issus de plaques océaniques subductées et le manteau sus-jacent ont modifié la lithosphère continentale, notamment archéenne, et peuvent expliquées les caractéristiques chimiques de la croûte continentale, (3) le rôle du métasomatisme ancien dans les processus de stabilisation des cratons, (4) enfin son rôle dans la distribution des formes oxydées (carbonates) et réduites (diamants, graphite) du carbone, donc dans les processus de formation du diamant et le cycle du carbone. Les résultats associés à ceux des du paragraphe 2 nous renseignent sur les modifications minéralogiques, chimiques et isotopiques d’un manteau très ancien et très réfractaire par des épisodes métasomatiques d’âges différents. Ce type de connaissance est fondamental dans le cadre des études de l’évolution chimique globale du manteau car de telles régions de manteau cratonique métasomatisé peuvent constituer des sources magmatiques potentielles si la racine cratonique dans laquelle ce manteau se trouve est détruite et reprise dans des zones tectoniquement actives et des processus de convection.

par Georges CEULENEER, Pierre GENTHON, Michel GREGOIRE, Marc MONNEREAU, Anne ORMOND,

Michel RABINOWICZ et Mike TOPLIS.